La confusion des genres
Ayant incontestablement acquis ses lettres de noblesse au rang des cultures musicales contemporaines, la Culture Électronique (Techno) fait encore et toujours couler beaucoup d’encre.
Cette dernière, symbole de modernité, de créativité, de tolérance et d’ouverture sur l’avenir, attire un public de plus en plus large.
Néanmoins les « Raves », soirées légales aux enjeux sous-estimés, sont sanctionnées pour des comportements déplorables d’inconscients, qui ne commencent pas aux portes d’une soirée. Elles demeurent également souvent confondues avec les « free parties ». De ce fait, elles restent le « cauchemar » des institutions.
Pourtant, de tous les courants musicaux, le mouvement des musiques électroniques est celui qui a pris le plus de précautions en matière de sécurité et de prévention pour obtenir une légitimité qu’on lui conteste encore trop souvent.
Dans l’intérêt de tous, il faut encourager ses acteurs et la professionnalisation de ce mouvement en facilitant et en simplifiant la démarche constructive déjà engagée par ces derniers !
La disparition des « Raves » au profit des « Frees »
Aujourd’hui en France, les festivals Techno légaux et officiels dit « Raves » ont quasiment disparu, triste conséquence d’une politique d’interdiction « aveugle » qui a provoqué la disparition de 80 % des organisateurs « professionnels », victimes de refus, de délivrances tardives ou d’annulation des autorisations préfectorales ou municipales.
Dès lors, on ne s’étonnera pas de l’essor d’une alternative dangereuse : les « free parties ». La vulgarisation de ces manifestations clandestines adoptées par ces « tribus aux valeurs libertaires » en quête de Zone d’Autonomie Temporaire est le produit incontestable de la répression « anti-rave » mise en œuvre par la circulaire de 95.
98 : l’espoir avorté
En 1998, la nouvelle circulaire co-signée par Les Ministres de l’Intérieur, de la Défense et de la Culture apportait l’espoir d’un réel changement. Celle-ci stipulait que « les manifestations rave et techno » devaient être considérées comme « une manifestation identique » à un « concert rock ».
Malgré cela, il est regrettable de constater que rien n’a changé dans les faits. Ainsi, même les producteurs les plus professionnels sont obligés de faire appel à leurs connaissances politiques afin d’inciter et d’encourager les Maires à autoriser ces manifestations culturelles électroniques sur leur commune.
Faciliter le Dialogue
Institutions et acteurs peinant vraisemblablement à s’entendre, il devenait indispensable, dans l’intérêt général, de créer e-nov1, un relais innovant ayant pour seul objectif d’agir, d’accompagner les artisans, les professionnels de la culture électronique ainsi que les institutionnels et les pouvoirs publics.
Organiser le débat
Le 25 mai dernier, alors que se profilait la polémique de « l’amendement Mariani », nous pensions qu’il était indispensable de s’extraire de l’éternel et stérile affrontement opposant liberté d’expression et sécurité. Désireux de relancer le débat public, nous nous étions attachés à définir le mouvement « free », ses origines et ses particularités, pour apporter des solutions concrètes permettant de mieux l’encadrer sans pour autant l’interdire :
- Créer un poste de délégué dans chaque région afin de conseiller et d’orienter les free parties sur des lieux plus adaptés à ce type de manifestation
- Créer un numéro vert national, lien direct avec le délégué
- Offrir des formations pour les « producteurs » de soirées non professionnels, notamment sur les obligations légales (déclaration, URSSAF, sécurité, sanitaire etc.)
- Réhabiliter des friches industrielles pour la production de soirées dans des lieux originaux
- Mettre en place une mission interministérielle chargée d’élaborer un futur cadre d’accompagnement pour les professionnels avec comme priorités, la sécurité, l’aide à la professionnalisation et la réduction des risques, suite logique du précieux travail de la MILDT (Mission Interministérielle de la Lutte contre la Drogue et la Toxicomanie)
Ce communiqué envoyé aux parlementaires, ministres, acteurs de la vie publique et artisans de la culture électronique, a été largement plébiscité et repris. Nous vous en remercions tous chaleureusement.
La « tribu » à la mode, victime de son succès
L’extrême visibilité des free parties durant l’été, a projeté cet épiphénomène (apparu voilà plus de cinq ans) aux devants de la scène, entraînant l’augmentation significative de leur fréquentation par un public inhabituel de jeunes, curieux, aventuriers ou narco-touristes.
Pris au dépourvu, les pouvoirs publics, les élus et les victimes, ont réagi en utilisant l’appareil législatif existant : plaintes, mises en examen et ouvertures d'informations judiciaires pour incitation à l’usage de stupéfiants, dégradation de biens privés, émission de bruits portant atteinte à la tranquillité publique, pénétration sans autorisation sur une parcelle privée cadastrée, organisation d'un spectacle sans autorisation ...
La clé de voûte
Cependant, le retrait en l’état de cet amendement nous semble positif. La saisie du matériel de sonorisation aurait sans doute mis nombre de sociétés en difficulté, sans résoudre aucun problème de « sécurité au quotidien ». Mais, comme nous pouvions le craindre, aucune solution de remplacement n’a été trouvée, abandonnant totalement les « free parties » à leur sort. La simple obligation de déclaration préalable n’apporte pas non plus de solution efficace.
La France devrait suivre l’exemple d’autres pays européens où de gigantesques manifestations légales sont organisées dans des entrepôts ou autres sites alternatifs qualifiés, minimisant ainsi les rassemblements sauvages et l’apanage des problèmes auxquels elle est confrontée.
La clé des champs serait-elle une voie plus facile pour tous ?
Faut-il fournir une caution morale tacite et sans équivoque à la clandestinité ?
La clé de voûte repose sur les acteurs constitués en société ou en associations car ils sont juridiquement responsables.
Les institutions et les pouvoirs publics doivent faciliter l’accès à des lieux originaux aux artisans de la culture électronique, et leur permettre ainsi d’exprimer leur créativité et leur professionnalisme au profit d’un public en tout état de cause demandeur.
Aider la création de spectacle vivant est la meilleure alternative à une marginalisation rampante qui pourrait bien conduire à l’apparition de nouvelles « formes de fêtes » toujours moins contrôlables et toujours plus dangereuses !
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